« Nous simplifions le diagnostic de câble »

Entretien avec Tobias Neier, directeur du Centre d’excellence en diagnostic BAUR

Les diagnostics de câble permettent d’évaluer l’état des câbles enterrés, de planifier les réparations et les investissements de remplacement de façon ciblée et d’éviter des pannes imprévues. Cela permet de réaliser des économies et d’augmenter la fiabilité du réseau. Alors que l’essai de câble n’offre que les résultats « Réussite » ou « Échec », le diagnostic donne des informations bien plus détaillées. Il permet de déterminer pendant combien de temps un câble pourrait encore être utilisé de manière judicieuse et économique, et s’il présente des points faibles. Tobias Neier, directeur du Centre d’excellence en diagnostic BAUR, compare le diagnostic de câble à un bilan de santé chez un médecin. Comme chez le médecin, le diagnostic de câble requiert une maîtrise de l’usage des appareils, de l’expérience pour l’évaluation des résultats et une interprétation individuelle de chaque mesure. Ce n’est qu’après que l’état de santé peut être évalué et les éventuelles mesures d’amélioration prises. Dans cet entretien, Tobias Neier explique comment le Centre d’excellence en diagnostic aide les utilisateurs à utiliser le diagnostic de câble et à élargir leur connaissances et leur expérience en la matière.

Monsieur Neier, vous comparez l’analyse de l’état du câble à  un bilan de santé. Pourquoi ?

Tout comme les êtres humains, les installations de câble sont différentes et requièrent une interprétation individuelle des résultats d’analyse et de mesure. Pour déterminer leur état, il faut avoir de l’expérience dans l’évaluation des résultats. Ceci fait peur à beaucoup de personnes, car il n’existe pas de valeurs limites applicables de façon universelle. Mais, qui s’y forme obtient, grâce au diagnostic de câble, des informations précieuses sur « l’état de santé » de son réseau de distribution, augmente la sécurité de l’approvisionnement et peut considérablement réduire les coûts.

Quels avantages économiques concrets offre le diagnostic de câble ?

Mais le diagnostic de câble est chronophage, cela en vaut-il vraiment la peine ?

Absolument ! Surtout pour les réseaux de distribution âgés. Si vous planifiez, par exemple, le remplacement de vos câbles XLPE âgés de 40 ou 50 ans uniquement à cause de leur durée d’utilisation officielle, vous jetez de l’argent par les fenêtres. Car, de nombreux câbles sont en bien meilleur état que leur âge ne le laisse supposer. Ici, contrairement à l’essai de câble, le diagnostic offre l’avantage de donner des informations-clés sur l’état des câbles tout en les préservant. Si le câble mesuré est véritablement arrivé en fin de vie, la mesure ne va pas « l’achever ». Tout au contraire, le diagnostic va révéler ses points faibles et vous permettre de prévoir des réparations ou son remplacement.

Est-ce que le diagnostic sert à identifier de tels points faibles ou plutôt à confirmer que le câble est en bon état ?

Les deux. Toutefois, en pratique, c’est le fait qu’on puisse continuer d’utiliser les câbles en raison de leur état et les économies en résultant qui pèse le plus dans la balance.

Pourquoi le diagnostic de câble n’est-il pas utilisé par tous les gestionnaires de réseau de distribution ?

Il y a probablement deux raisons : Tout d’abord, ils doivent acheter l’équipement technique nécessaire et justifier non seulement les investissements, mais aussi le temps requis pour les diagnostics auprès de la direction. Ensuite, il y a souvent une certaine incertitude sur la meilleure manière de réaliser les diagnostics et d’évaluer les résultats afin de bénéficier des bienfaits économiques souhaités.

…c’est donc une question de temps à investir et d’expérience…

Exactement. En ce qui concerne le temps, le diagnostic de câble VLF BAUR offre de nombreuses possibilités de réaliser les mesures rapidement et de les intégrer facilement dans les processus de travail de l’équipe de service extérieur. D’une part, nous proposons depuis peu la mesure de décharges partielles en ligne rapide qui permet de présélectionner les liaisons câblées à diagnostiquer. D’autre part, il est possible d’exécuter en parallèle les mesures hors ligne pour déterminer les décharges partielles et le facteur de dissipation, et même de les combiner avec l’essai de câble. Cela réduit considérablement le temps nécessaire.

Ces mesures et ces processus de mesure semblent être plutôt simples. Pourquoi proposez-vous également des prestations de conseil dans ce domaine ?

Parce que, comme c’est le cas avec les appareils médico-techniques dans un cabinet médical, la manipulation de ces appareils doit être apprise et que nous montrons en outre aux utilisateurs qu’avec nos appareils, ils ne se contentent pas d’exécuter des séquences standards, mais peuvent aussi implémenter leur propre philosophie de diagnostic. Ceci requiert une formation plus poussée, mais peut également considérablement en augmenter l’utilité pour l’entreprise. Finalement, les gestionnaires de réseau peuvent mettre en œuvre leur stratégie de diagnostic personnalisée.

 

C’est-à-dire : des cycles de mesure similaires et propres à l’entreprise sur tous les appareils pertinents que tous les utilisateurs, même peu expérimentés, peuvent exécuter. On obtient ainsi des résultats similaires, comparables entre eux, et surtout qui, après quelques années de diagnostic donne une grande fiabilité dans l’évaluation de l’état du câble. Et tout comme chez le médecin qui apprend à mieux connaître ses patients au fil du temps, les gestionnaire de parcs tirent profit des « carnets de santé » des câbles. Ils peuvent ainsi lire les tendances et en tirer des conclusions pour l’entretien.

La formation à l’utilisation des appareils n’est toutefois qu’une partie de ce que transmet le centre de compétence. Quels autres services propose votre équipe ?

Nos prestations vont du conseil avant l’achat en passant par les formations à l’utilisation des appareils et des logiciels, la création d’une stratégie de diagnostic et d’une logique d’évaluation, jusqu’à l’utilisation optimale du logiciel d’analyse statex®. Chez Baur, nous parlons de « home of diagnostics », car nous voulons que nos utilisateurs se sentent à l’aise à chaque étape du diagnostic, qu’il s’agisse de la mesure, de l’analyse ou de l’évaluation.

Vous venez d’évoquer le conseil avant l’achat. Pouvez-vous nous en dire plus Monsieur Neier ?

Tout d’abord, nous discutons avec le client de ce qui est important pour lui. Pour cela, il y a un certain nombre de choses à éclaircir : est-ce que la fiabilité est au premier plan ou est-ce les coûts d’entretien ? Son réseau est-il dans un état qui nécessiterait plusieurs investissements de remplacement dans un futur proche ? Quelle est la topologie de son réseau ? En matière de stratégie de diagnostic, un réseau urbain correctement maillé présente par exemple des exigences totalement différentes de celles d’un réseau de distribution d’un parc industriel ou d’un réseau rural avec de nombreuses dérivations. Et, le type de câble utilisé, papier imprégné, XLPE de la première génération ou plus récents, câble PE, est bien entendu également important. Sur la base de ces informations, nous pouvons élaborer des recommandations pour optimiser l’approche de diagnostic de câble ainsi que la technique et la logique d’analyse adaptées.

Quel rôle joue le diagnostic en ligne mentionné auparavant, par exemple avec un coupleur DP VDS, dans l’amélioration de l’efficacité du diagnostic ?

Le diagnostic en ligne y joue un rôle-clé, car il est rapide et facile à réaliser. Ce n’est que récemment que nous avons mis le coupleur DP VDS sur le marché. Il s’agit d’un accessoire de notre appareil de mesure liona permettant de détecter des décharges partielles (DP) sur les liaisons câblées, sans mettre les câbles hors service. Il suffit de brancher le coupleur sur les prises VDS de l’appareillage de commande. La mesure ne dure donc que quelques minutes et une mesure de décharges partielles hors ligne n’est nécessaire que si la mesure en ligne indique un état critique. Finalement, les utilisateurs passent donc beaucoup moins de temps à réaliser les mesures des DP, car, généralement, la majorité des liaisons mesurées sont en bon état.

Quelles sont les autres options permettant de réaliser le diagnostic de câble rapidement ?

On peut par exemple citer l’exécution en parallèle de la mesure de décharges partielles hors ligne et de la mesure de Tangente Delta (mesure de TD). Les deux sont réalisés en un cycle de mesure, avec au choix un essai de câble classique. Pour finir, citons le Monitored Withstand Test.

Ici, la tension d’essai et la tension de mesure s'établissent successivement. Si les résultats de la mesure indiquent que le câble est intact, la séquence peut être raccourcie. Si le câble semble au contraire vétuste ou endommagé, prolonger la durée de la mesure pourra le confirmer. Il ne doit donc être mesuré et testé qu’aussi longtemps que son état le permet.

 

L’avantage ici est que l’essai de câble n’est pas effectué si le diagnostic indique que le câble est déjà endommagé. On évite ainsi que les câbles ne soient endommagés par l’essai.

 

L'évaluation des résultats de mesure est également rapide. Sur la base de critères que les utilisateurs peuvent eux-mêmes influencer, le rapport distingue tout d’abord les câbles en bon état, ceux devant être surveillées et ceux fortement usagés. Si une intervention spontanée est nécessaire, le technicien de mesure le voit immédiatement sur l’appareil de mesure sur site ou au début du rapport. Par la suite, les rapports deviennent plus concrets. Ils sont bien entendu faciles à exporter et à traiter dans la gestion des actifs, par exemple pour faire des comparaisons ou déterminer des tendances.

La mesure du facteur de dissipation et la mesure des décharges partielles sont donc toutes deux pertinentes. Pourquoi est-ce que la mesure de TD est importante pour l’évaluation de l’état ?

Pour l’expliquer, je vais encore une fois utiliser la comparaison avec un médecin. Si vous réalisez uniquement une mesure de décharges partielles, cela serait équivalent à un bilan sur la base d’une prise de pouls et de la tension artérielle. L’absence d’analyse sanguine pourrait conduire par exemple à des conclusions erronées sur l’état de santé de la personne. C’est aussi ce que se passe lorsque vous ne mesurez que des décharges partielles, ce que font de nombreux gestionnaires de réseau. Vous détectez certes des décharges partielles sur les boîtes de jonction ou les accessoires, ou encore d’éventuels arbres électriques dans l’isolation plastique sur lesquels on retrouve des décharges partielles. Cela vous permet d’identifier les points faibles des câbles et les accessoires risquant d’entraîner une panne dans un futur proche. Mais, vous en apprenez cependant très peu sur l’état général de l'isolation du câble et sur l’action de l’humidité, raison pour laquelle la mesure de Tangente Delta est importante. Vous obtenez un maximum d’informations lorsque vous interprétez ensemble les résultats des deux méthodes.

Pourquoi les résultats de la mesure de décharges partielles et de la mesure de Tangente Delta sont-ils mieux évalués ensemble ?

Je vais vous l’expliquer en utilisant un exemple : lorsque vous réalisez, par exemple une mesure de décharges partielles et que vous en décelez d’importantes sur une boîte de jonction, vous ne pouvez pas encore clairement les interpréter, car elles pourraient être aussi bien dues à de l’humidité. La mesure de Tangente Delta indique quant à elle si les accessoires sont secs. Ce n’est que lorsque vous savez que l’accessoire est sec que vous pouvez correctement interpréter les décharges partielles mesurées sur celui-ci et, le cas échéant, prendre les mesures adaptées. Les accessoires sous l’influence de l’humidité et les accessoires secs sont interprétés différemment.

À propos d’interprétation. De nombreux utilisateurs potentiels ne sont pas à l’aise avec le fait que le diagnostic n’ait pas de valeur de seuil simple, par exemple « positif » et « négatif ». Pourquoi est-ce le cas et comment les aidez-vous ?

Certains considèrent sûrement que cette évaluation a la valeur de la lecture du marc de café. Pourtant, ce n’est pas le cas. Ce qui manque en réalité, ce sont des valeurs de seuil fixes pour la mesure de décharges partielles, pouvant être utilisées sur tous les types de câbles ou sur des liaisons mixtes. C’est ce qui rend le tout plus complexe.

 

C’est pourquoi nous aidons les utilisateurs à savoir comment interpréter leurs résultats de mesure. Nous développons ensemble sur demande une stratégie d’analyse et une logique d’évaluation, et nous les aidons pour les analyses. La logique d’évaluation est personnalisée et peut donc diverger en fonction du réseau et des propriétés. Mais la propre expérience joue également un rôle. C’est ainsi qu’il est possible d’apporter une aide au démarrage grâce à une expérience de longue date sur le terrain.

Grâce aux mesures répétées, aux analyses de tendance, à l’analyse des causes des pannes sur les liaisons câblées et bien plus encore, l’utilisateur acquiert une expérience précieuse augmentant l’importance du diagnostic de câble pour l’entreprise au fil des années et permettant de réajuster la logique d’évaluation ici et là.

La logique d’analyse permet d’initier des plans d’action concrets. Grâce au home of diagnostics ou à notre centre de compétence, nous pouvons accompagner les utilisateurs dans ce sens. Nos relations de longue date avec les clients nous aident à approfondir leur expérience, mais aussi notre expertise, et à la partager avec d’autres clients. C’est d’ailleurs d’une telle relation avec un client qu’est née l’une de nos solutions logicielles qui permet à l’utilisateur de convertir les valeurs de la mesure de Tangente Delta en un indice de vieillissement et de pouvoir calculer la durée de vie résiduelle : statex®.

Que fait exactement le logiciel d’analyse de calcul de la durée de vie résiduelle statex® ?

Le logiciel statex® se base sur une logique d’analyse développée par l’entreprise coréenne KEPCO pour ses analyses de la mesure de Tangente Delta.

 

Avec BAUR, cela a donné naissance à statex®, une solution alliant processus statistique de calcul et expérience approfondie. D’où également son nom composé des termes « statistiques » et « expérience ». Le logiciel a accès à une base de données regroupant les valeurs de mesure de plus de 120 000 câbles. Au début, on n’y retrouvait que les valeurs des câbles XLPE, mais, entretemps, y sont aussi enregistrées les résultats de diagnostic de câbles PILC et de liaisons câblées.

 

Les utilisateurs de statex® peuvent donc, en toute fiabilité, déterminer une durée de vie résiduelle de leurs câbles se référant à l’ensemble de la base de données.

Et le résultat de statex® est la durée de vie résiduelle en années ?

Oui, mais pas seulement. D’une part, le logiciel détermine la durée de vie résiduelle prévisible. Ce calcul sera validé avec plus de précision par des mesures répétées ultérieures se rapportant au vieillissement respectif de chacun des câbles. D’autre part, statex® donne des recommandations sur la date la plus judicieuse pour refaire la mesure de Tangente Delta ou si d’éventuelles mesures de renforcement doivent être planifiées à moyen ou à court terme. Les utilisateurs n’ont donc pas besoin de réaliser des diagnostics à des intervalles fixes, mais de les planifier en fonction de l’état. Les câbles en bon état seront mesurés bien plus tard que ceux déjà proches de la fin de leur durée de vie. Une planification du diagnostic en fonction des besoins libère généralement de la capacité de travail, permettant ainsi de diagnostiquer plus de câbles du réseau. Ceci améliore de nouveau les effets d’épargne et la fiabilité.

Monsieur Neier, si pour finir je vous demandais quel conseil vous donneriez à ceux qui souhaitent s’engager dans la voie du diagnostic de câble, lequel serait-il ?

Avec plaisir. À ces personnes, je conseillerai de tirer profit de nos conseils et de notre accompagnement afin de bénéficier de notre expérience de plus de trente ans aujourd’hui, dans le domaine du diagnostic de câble VLF. Une logique d’analyse permet d’initier des actions claires, dès le début. Les nouveaux clients peuvent compter sur notre expérience approfondie et obtenir de la valeur ajoutée dès le début. Ils peuvent ainsi éviter les mauvais investissements et mettre en œuvre une stratégie de diagnostic ciblée. Le temps investi en vaut la peine : pour finir, le diagnostic de câble permet de réaliser des économies considérables sans compromettre la fiabilité du réseau, et la gestion des actifs a la base nécessaire à la planification de l’entretien du réseau.